Obeissance : « Action ou habitude d'obéir, de faire ce qui est commandé »
Obéir : « Se soumettre à la volonté de quelqu'un, à un règlement, exécuter un ordre »
Dressage : « Forme d'éducation, d'apprentissage particulièrement sévère »
Dresser : « Rendre docile un animal, l'habituer à des comportements qu'on exige de lui »
"Si retirer le pouvoir à un homme provoque chez lui la même réaction que celle d'un bébé à qui on enlève son doudou, c'est parce que se sont des tendances profondément inscrites en nous."
Frans De Waal, La dernière étreinte
CQFD
Vous l’aurez compris, les mots ont un sens qu’il ne faut pas négliger. Ces mots semblent encore ancrés dans notre langage canin, voire même animalier. Si des remises en question semblent faire mouvoir nos façons de penser le chien, de vivre avec le chien (et le chat) ; le monde équestre lui, par exemple, est beaucoup plus en retard … Mais ce n’est pas le sujet du jour.
Ces stéréotypes provenant d’un mythe ancestral dans lequel le chien reste un chien et doit obéir, ne suggèrent aucun choix, aucune prise d’initiative de la part de l’animal. Il doit exécuter, sans réfléchir ce qu’on exige de lui. C’est triste n’est-ce-pas ? Fort de constater que ces pensées restent ancrées en nous. En effet, même si les choses bougent, même si la place du chien se voit évoluer ; nous, espèce humaine, sommes toujours habités par cette soif de pouvoir et par une tendance exaspérante à vouloir à tout prix, garder le contrôle.
1. ASSIS !
Simone la première a appris à Alfred à s’assoir ; doigt pointé entre ses deux yeux, voix ferme : « Assis ! ». C’est la première chose qu’elle lui a enseigné. Pourquoi ? Parce que c’est la première chose qu’on demande lorsqu’on perd le contrôle. C’est aussi l’une des premières choses que l’on trouve dans les apprentissages indispensables sur Youtube …. Bull Shit …
Alfred doit attendre, vous lui demandez de s’assoir. Peut-être que cela vous rassure ? Comme si le faire assoir, ancrerait ses fesses dans le béton, le celant ici, à cet endroit précis où vous désirez qu’il attende, jusqu’à que vous ayez décidé qu’il reparte.
SCOOP n°1 : Alfred n’a pas besoin de s’assoir pour attendre … il sait parfaitement s’arrêter debout ! Et il vous donnera davantage d’informations la queue en l’air que s’il est assis dessus …
Cette demande si populaire a-t-elle réellement un sens pour eux ? En a-t-elle un pour nous ? Si ce n’est que l’expression de … contrôle de notre part, nous, petits êtres humains.
Demandez-vous, pourquoi devrait-il s’assoir ? Et la réponse « je dois prendre sa petite frimousse en photo » ne fonctionne pas … Alfred est bien plus photogénique les fesses en l’air que par terre !
2. PAS BOUGER !
Comme exprimé plus haut, les mots ont un sens et la façon dont nous les prononçons en découle. Dites « Pas bouger ! » à Alfred, cela ressemble indubitablement à un ordre. Votre intonation n’est ni douce, ni invitante. Vous êtes comme à l’armée, dans les rangs, et vous ne pouvez même pas vous gratter les fesses ! Voilà comment Alfred se sent, à cet instant précis où Kiki se dirige vers lui.
Dites maintenant : « Tu attends ». Celle-ci ressemble plus à une invitation, votre voix s’adoucit, et Alfred a arrêté d’haleter comme si sa vie en dépendait. En effet, il s’agit ici d’une demande et non d’un ordre, qui suggère une réflexion ainsi que de lui laisser le choix (certes de faire le bon choix). C’est n’est pas grand-chose sur le papier, mais c’est beaucoup dans votre relation !
3. Un chien qui obéit est un « bon chien ».
ERREUR ! Vous êtes-vous seulement posé cette question : pourquoi le chien n’obéit pas ? Il n’est ni méchant, ni têtu et n’éprouve aucun plaisir à vous tenir tête. Peut-être que Alfred n’a simplement pas compris le sens de votre question. Pardon, de votre injonction. Mais encore, Alfred est dans une situation très délicate dans laquelle se soumettre à votre ordre le mettrait dans une position très inconfortable.
Kiki, ce chien qu’il n’a encore jamais rencontré, arrive droit devant. Alfred, conditionné aux ordres de Simone, a dû s’assoir à sa demande … autant vous dire que Simone l’a mis dans la panade … Alfred est assis sur une partie de son corps dont il a besoin pour communiquer, son arrière train, là, maintenant ! Et pourquoi ? Tout ça pour que Simone se rassure en pensant que Alfred n’ira pas voir Kiki. Parce que donner un ordre, nous donne sans doute l’impression de garder le contrôle de la situation. Sauf que, finalement c’est Kiki qui se ramène, pas très enjoué par l’accueil qu’on lui réserve… Alfred n’a plus qu’à serrer les fesses. Merci Simone.
Et si, pour une fois on leur laissait le choix ? Peut-être même que Alfred ne voulait pas de cette rencontre ; mais là, les fesses ancrées dans l’herbe, il ne peut ni communiquer correctement, ni choisir de décliner cette rencontre. Il n’a aucune autre possibilité que de subir la situation. Voilà où nous a mené cette vilaine habitude de « faire obéir le chien » de façon totalement inadéquate.
4. L’"obéissance" est une forme d’hyperconditionnement.
Prêt à parier que si Alfred accepte de s’assoir et de ne « pas bouger », c’est qu’il sait pertinemment qu’une Knacki l’attend en retour (s’il on pense positivement …). Réitérez cette demande, ce non-sens, sans l’avoir conditionné à une récompense très motivante (ou à une punition inhibante), Alfred devrait réfléchir à deux fois avant de poser son popotin sur le sol désagréablement humide, au risque que Kiki en face, loupe une partie de la conversation…
Logique : premièrement cet ordre n’a aucun sens pour Alfred, deuxièmement il le met dans une position délicate.
SCOOP n°2 : Oui, bien vu l'artiste ! Distribuer des « bonbons » en échange des comportements souhaités, exigés et bien exécutés, n’est pas nécessairement de « l’éducation positive ».
Aujourd’hui, à mon sens, l’obéissance que l'on entend sous forme de colliers torcatus, barbus et martinés, n'est plus la seule forme de coercition. Certes, ici nous avons banni la violence physique, Hallelujah ! Néanmoins, nous assistons à l'aire de l'hyperconditionnement à coup de saucisses, de clicks, « assis, couché, pas bouger », des non-sens, des broutilles ! (Je parle ici d'excessivité et de robotisation sans prendre en compte le sens et la pertinence de nos demandes ainsi que l'état émotionnel de nos poilus). Mais avez-vous seulement essayer de comprendre ce que vous dit Alfred ? Et les apprentissages indispensables pour un poilu bien dans sa caboche ? Je pense, bien sûr à la gestion émotionnelle, la capacité d’adaptation, à sa manière de communiquer et de se présenter à ses congénères, la frustration, le renoncement, tout ça, tout ça ... la vie quoi !
5. Faire « obéir » suggère d’oublier l’intelligence émotionnelle de nos chiens.
Effectivement, Alfred a des émotions, il ressent des choses, il a un petit cœur qui bat, un cerveau qui travaille et il a besoin de sens. Comme Simone !
Mettez de côté l’hyperconditionnement. C’est presque une insulte à la nature du chien. C’est oublier qu’il a un esprit, un corps et un environnement à gérer ; pas à notre manière, j’entends bien à sa manière. Nous sommes là pour l’aider et le guider, non pas pour le façonner à ce truc qu’on voudrait qu’il soit. Prenez le temps de comprendre, d’écouter ce qu’il vous raconte. Alfred n’en serait que reconnaissant d’avoir le choix de rencontrer Kiki de manière plus adéquate. Cet échange entre vous et lui n’en sera que bénéfique pour votre relation, pour le bien-être de votre poilu et pour le vôtre. 😉
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